• Traité du funambulisme, Philippe Petit, Actes Sud

    Traité du funambulisme, Philippe Petit. Actes Sud, 150p, 15 euros.

    Voici un livre comme je les aime : déroutants, inclassables. On tombe dessus, par hasard, puis dedans, et on n’en sort pas. Celui-ci est préfacé par Paul Auster, à qui l’on doit la publication de ces carnets, refusés par une vingtaine d’éditeurs, et présenté en 4ème de couverture par Werner Herzog, le cinéaste qui fit passer un navire par-dessus une montagne. Il est de pires parrainages.

    Philippe Petit est funambule. Jongleur, cavalier à l’occasion. Sans « sponsors » ni caméras de télévision obligés, sa raison d’être est de relier à pied, mais sur câble et à quelques dizaines de mètres de hauteur, les lieux les plus inappropriés à une performance sportive : les ex Twin Towers ou les chutes du Niagara par exemple. Pour le plaisir, pour le geste. Parce que c’est inutile. C’est encore plus beau.

    Parfois, il ne demande même pas la permission et ne prévient personne. C’est ainsi que certains badauds ont pu voir un jour une silhouette passer d’une des tours de Notre-Dame à l’autre. La célébrité n’était pas au rendez-vous, mais seulement la police pour le cueillir à l’arrivée et le garder quelques jours au trou. C’est ainsi que l’on récompense les héros, mais si tout le monde se met à faire la même chose, où va-t-on, je vous le demande ?

    Philippe Petit écrit aussi, entre deux traversées. Des notes, des réflexions, des observations, des conseils amicaux aux aspirants funambules. Le toucher du pied sur la corde, l’âme du câble (car il a une âme, saviez-vous ?), l’installation du matériel, le vent, la chute, la peur, le travail avec ou sans balancier…Le quotidien, quoi. A le lire, rien d’impossible. Il suffit d’avoir envie. Ses textes, simples, fluides sont d’une absolue poésie.  Homme de l’air, enlumine de ton sang les très riches heures de ton passage sur terre. Les limites n’existent que dans l’âme de ceux qui sont dépourvus de songes.

    Car Philippe Petit est un poète. Un poète qui prend soin de bien arrimer son câble et d’évaluer la force du vent. Et jamais sûr d’arriver à l’autre bout du fil.

    Au cours de cette lecture, ces lignes de Rimbaud se sont réveillées dans ma mémoire: « j’ai tendu des cordes de fenêtre à fenêtre, des guirlandes de clocher à clocher, des fils d’or d’étoile à étoile, et je danse ». Philippe Petit est cet homme-là. Faiseur de rêves. Homme libre. Exigeant et hors du commun. Courez vite à sa rencontre.


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